LOUP-GAROU

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« Devient loup-garou celui qui a manqué à ses devoirs religieux, négligé, par exemple, de faire ses pâques ; il sera libéré lorsqu’une blessure lui fera perdre quelques gouttes de sang. »
Pamphile Lemay

Un loup-garou sur une gravure du XVIIIe siècle, par Ian Woodward.Un loup-garou sur une gravure du XVIIIe siècle, par Ian Woodward


Cette citation de mon ancêtre, Pamphile Lemay, me ramène dans ma jeunesse, alors que je passais mes vacances d’été sur la ferme de mes grands-parents.
Ils n’avaient pas encore de téléviseur et les veillées s’écoulaient lentement, entre le chapelet et le dodo. Après la vaisselle, ma grand-mère préparait la table du déjeuner dans la cuisine d’été et mes tantes se rendaient à l’étable pour donner un coup de main avant le chapelet. La religion tenait une grande place dans la vie des cultivateurs et toutes les histoires et contes tournaient autour du bon Dieu et du Diable.

Tous étaient réunis pour les prières du soir et une fois que la radio avait entonné son dernier Ave, chacun prenait son siège préféré. Mes tantes tricotaient à la faible lueur d’une ampoule suspendue au bout d’un fil électrique et mes oncles bourraient généreusement leur pipe avant d’entamer leurs moqueries habituelles. La conversation tournait assez rapidement à des contes pour nous faire peur, des histoires pour nous inciter à rester dans le droit chemin.

Mon grand père contait souvent, à qui voulait l’entendre, cette histoire de Wenceslas-Eugène Dick. Un peu de recherche m’a permis de croire qu’elle aurait été publiée en 1895 dans un ouvrage intitulé «Pour la patrie».
La voici :
Jean Plante restait dans un vieux moulin situé en retrait des autres habitations, sur la pointe d’Argentenay à l’île d’Orléans. Le jour, son jeune frère, Thomas, venait l’aider pour faire le plus gros de l’ouvrage, mais la nuit, il couchait seul au deuxième étage. Le bougre n’était pas peureux, il était même barbeux quand il avait trop bu, ce qui lui arrivait six jours sur huit. Si on le croisait dans cet état, il valait mieux filer doux sinon il était capable de vous attaquer à grands coups de faux.

Un après-midi, alors que Jean Plante avait levé un peu trop le coude, un quêteux se présenta au moulin et lui demanda la charité au nom de Dieu.
– La charité ! espèce de quêteux!... Attends, j’vas t’la faire, moi, la charité ! cria Jean, qui courut vers le pauvre homme pour lui donner un gros coup de pied au cul. Le quêteux se retourna et fixa le meunier d’une paire de z’yeux qui en disait long. Puis il s’en alla.

Sur la route au pied de la côte, il rencontra Thomas qui arrivait avec une charrette de grain.
– La charité, au nom de Dieu?... qu’il demanda, poliment, en ôtant son vieux chapeau.
– Va su l’diable : j’ai pas l’temps ! répondit durement Thomas, qui s’est mit à fouetter son vieux cheval.
Alors, le quêteux, sans un mot, étendit sa main du côté du moulin et disparut dans le bois. Aussitôt, le moulin s’arrêta net.
Jean lâcha un blasphème et alla voir ce qu’il y avait. Mais il a eu beau examiner toutes les roues d’engrenage, les courroies et tout le bataclan, il ne trouvait rien, et l’eau ne manquait pas non plus.

Il appela son frère et se mit à le sermonner vertement car il pensait qu’il y avait des cailloux dans son avoine. Après avoir examiné la meule tous les deux, ils virent bien que tout était correct et que le moulin aurait du marcher.
– C’est le maudit quêteux de tout à l’heure qui lui a jeté un sort, dit Thomas.
– Air bête ! Tiens, voilà où je me les mets, moi, les sorts, dit Jean, en donnant un de ses gros coup de pied au cul de son frère.

Pauvre Thomas, le coup était si fort qu’il retomba dix pieds plus loin. Quand il se releva, bleu de colère, il se rua vers Jean. Mais le meunier, lui prit les poignets et l’arrêta court.
– Arrête-là, ti-frère ! dit-il, lève pas la main sur Jean Plante, ou t’es cuit.
Thomas vit bien qu’il n’aurait pas le dernier mot. Il ramassa son chapeau. Puis il sortit, en montrant le poing à son frère et lui dit d’un ton menaçant :
– Quand tu me reverras !

Jean resta donc seul tout le reste de l’après-midi à essayer de faire marcher son moulin. Mais la grande roue faisait un tour, puis, crac ! Elle s’arrêtait net.
– Remettons ça à demain. se dit enfin Jean Plante. En attendant, prenons un p’tit blanc puisqu’il n’y a rien d’autre à faire.
Et notre homme installa sa cruche sur la table et se mit à boire, un verre n’en attendait pas un autre, si bien qu’il était soûl comme une bourrique. A minuit, il songea alors à se coucher.

C’est facile de monter à l’étage quand on est à jeun mais c’est tout autre quand t’as les jambes comme de la guenille. Une fois en haut de l’escalier, et après plusieurs embardées sans trouver son grabat, il se fâcha et se lança pour la vie ou pour la mort dans la porte de l’escalier, restée entrouverte.

Jean roula jusqu’en bas, comme un gros paquet et se retrouva dehors. Pas possible de remonter. Il décida de passer la nuit-là, à l’orée du bois, avec le sol dur comme grabat. Même soûl, Jean ne put s’endormir et il se mit à compter les étoiles.

Aux petites heures du matin, un grand vent s’engouffra dans la cage de l’escalier et éteignit la chandelle qui était restée allumée.
– Merci, monsieur le vent, d’avoir soufflé ma chandelle, dit Jean Plante, vous êtes plus ménagé que moi. Et il se mit à ricaner. Mais ça ne dura pas longtemps, la lumière réapparut après quelques minutes.

Pendant une bonne heure, la lumière se promena d’une fenêtre à l’autre, comme si elle flottait toute seule. En même temps, il y avait des bruits de chaînes et des gémissements à l’intérieur du moulin. C’était à faire dresser les cheveux sur la tête. Puis, après ce tapage, des feux follets bleus, verts, rouges, se mirent à danser sur les pignons du toit. Il y en a même qui sont venu effleurer la figure de Jean au point que sa barbe et sa chevelure sentait le roussi.

Enfin, comble de malheur, un grand chien à poil roux, rôdait à l’orée du bois, s’arrêtant parfois et fixant le meunier de ses deux gros yeux rouges comme des charbons enflammés. Jean Plante en avait froid dans le dos et les poils raides comme une brosse à plancher. Il essaya de se relever, plusieurs fois, pour courir vers le village mais la terreur le figeait là, autant que l’ivresse. Ce n’est qu’au petit jour que toutes les épouvantes de cette nuit terrible avaient disparu.

Jean retrouva son courage et se moqua de ce qu’il avait vu. Et aussitôt qu’il eut callé deux ou trois bons verres de ti-blanc, il redevint barbeux comme la veille et se mit à défier tous les revenants et loups-garous de l’île de venir l’affronter.

Mais n’ayant pas réussit à repartir le moulin, il vit arriver le soir avec une certaine crainte. Il avait beau se dire qu’il avait rêvé la nuit précédente, son esprit n’était pas tranquille et l’orgueil l’empêchait d’aller au village. Il coucha donc bravement au moulin, mais non sans avoir bien fermé portes et fenêtres. Jean espérait enfin pouvoir compter sur une bonne nuit et rien ne se produit jusqu’à minuit.

Alors que le douzième tintement de l’horloge finissait de résonner, le tapage recommença. Bang ! Un coup d’poing par ici, boum ! Un coup d’pied par là, et des lamentations, et des gémissements et des bruits de chaînes ! Puis des chuchotements et des souffles étranges qui se croisaient dans sa chambre, de quoi faire mourir de peur !

Jean se fâcha ben dur. Il bondit sur sa grande faux et, jurant comme un démon chercha dans toutes les chambres du moulin et aussi dans le grenier mais, curieusement, quand il arrivait dans un endroit, le bruit cessait aussitôt pour reprendre dans une autre pièce. Fatigué de chasser les fantômes, Jean Plante regagna son lit et se cacha sous ses couvertes, tout en grelottant de peur et de fièvre pour le reste de la nuit. Et ça a duré, comme ça, pendant toute une semaine.

Le soir du huitième jour, qui se trouvait à être le jour de la Toussaint, Jean avait manqué la messe, aimant mieux passer son temps à boire. Le pauvre homme avait une très mauvaise mine. Les yeux bouffis et brillants de fièvre en disaient assez long sur l’affreuse semaine qu’il avait passée. Dehors, le vent fouettait les vitres avec une petite pluie, qui durait depuis le matin. La nuit monta, noire comme de l’encre et Jean, accoté sur la table, regardait sa cruche d’un air hagard.

Il faisait sombre dans la chambre. Lorsque l’horloge sonna onze heures, Jean Plante voulu se lever pour aller au lit se cacher. Mais l’orgueil le garda sur sa chaise.
– Il ne sera pas dit que je me laisserai faire, je n’ai pas peur, moi !... Non, non, je n’ai peur de rien ! dit-il d’une voix farouche.

Et il se versa une lampée d’un air de défi. Lorsque l’horloge sonna lentement les douze coups de minuit, Jean ne bougea pas. Il regardait partout, les yeux grands comme des lunettes. Au dernier coup, une rafale de vent ouvrit la porte qui était pourtant bien fermée et le grand chien roux apparut dans l’encadrement. Il s’assit sur son derrière, près du chambranle, et se mit à fixer Jean Plante de ses yeux rouges et pendant cinq longues minutes, le meunier et le chien se dévisagèrent, l’un rempli d’épouvante et les cheveux raides sur la tête et l’autre calme et menaçant.

À la fin, Jean, pour mieux voir, se leva et voulut moucher la chandelle, mais la chandelle s’éteignit sous ses doigts. Il chercha vite les allumettes qui avaient disparues. Alors il eut véritablement peur et se mit à reculer dans la direction de son lit, en surveillant l’animal qui ne bougeait pas.

Enfin, le chien se leva lentement et se mit à fureter de long en large dans la chambre tout en se rapprochant du lit. Ses yeux étaient devenus brillants comme des tisons, et il les gardait toujours fixés sur le meunier. Quand il ne fut plus qu’à quelques pas de Jean Plante, ce dernier sauta sur sa faux qui était toujours accrochée sur sa tête de lit.

Il frappa furieusement l’animal et aussitôt il arriva une chose bien curieuse. Le moulin se remit en marche et dans une lueur soudaine, Thomas Plante, son frère, surgissait avec une allumette enflammée dans ses doigts. Le grand chien avait disparu!

Sans dire quoi que ce soit, Thomas alluma la chandelle et voyant son frère qui tenait toujours sa faux :
– Eh ! là ! dit-il, qu’est ce que tu fais donc là, à la noirceur, avec ta faux ? Serais-tu devenu fou ?
Jean, le regard perdu, ne répondit pas. Il regardait son frère, à qui il manquait un bout d’oreille.
– Qui t’a fait ça ? demanda-t-il faiblement.
– Bah! Tu l’sais bien ! répondit Thomas qui ramassa par terre un bout d’oreille de chien, encore saignant. Jean Plante éclata d’un rire lugubre. Il était devenu fou !


FIN



Quelques liens sur les loups-garous
The Werewolf Page




Loups Garou,Légende du Québec


Loups Garou,Légende du Québec
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ENGLISH VERSION OF THIS POST: WEREWOLFS

7 commentaires:

  1. Bonjour Gélisa,

    J'ai adoré la vidéo sur la légende des loups garous. Fascinant! Ce qui est le plus intriguant, c'est la croyance qui semble si ancrée dans la tête de personnes qui ont l'air normal et crédible.

    Je ne crois pas aux loups garous, bien sûr. Mais le phénomène psychique lui m'intrigue.

    Merci d'être venue me visiter. Je reviendrai aussi.

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  2. Merci de ce vidéo, j'ai adoré aussi!

    J'adore le mysticisme, les légendes et tout, alors j'ai été enchantée de voir ceci!

    -xxx-

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  3. Très intéressant ce petit video. Merci!

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  4. Vidéo intéressante et très enrichissante meme si je ni crois pas
    Et merci pour l'histoire.

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  5. Je pense que si les loup-garou existeraient il y aurai eu des mort ...

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  6. je croit que les loup-garou existent mais qu'ils ne sont pas comme nous le croyons je croit que se sont des créature vivant a la pleine lune dans les bois très dense ou personnes ne va donc il pourrait très bien se cacher et je croit qu'ils ne se nourrissent que d'animaux sinon comme la dit la personne juste avant il y aurait eu des morts

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